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Le musée Cécile Sabourdy

Découverte du Patrimoine Limousin

Dans le cadre des conférences de l’ARAL, Stéphanie Birembaut, directrice des Musée et jardins Cécile Sabourdy, a donné le 17 septembre 2019, à la Bfm de Limoges, une conférence magistrale sur “Cécile Sabourdy et l’art naïf”

La qualité exceptionnelle de cette conférence nous a donné envie d'écrire ce comte-rendu avec le désir de patager avec vous cet aspect riche et original de notre patrimoine.

La conférence de Stéphanie Birembaut sur “Cécile Sabourdy et l’art naïf” a été si riche et éclairante qu’elle nous a donné envie de comprendre la démarche critique qu’avait suivie Stéphanie Birembaut pour aborder devant nous les oeuvres aussi différentes d’André Bauchant, Cécile Sabourdy et celles d’Existence qui se trouvent dans le très beau musée de Musée de Vicq sur Breuilh.

Peut on parler de méthode critique ? Oui, bien sûr, car la conférencière, sans jargon critique, nous a dévoilé l’originalité de chaque tableau présenté avec finesse et rigueur. En même temps la démarche de Madame Birembaut ne relève pas d’une approche critique systématique.

Même si elle est présente, tout en se faisant discrète, on ne peut pas dire que l’érudition “scientifique” a fait seule le succès de cette conférence. La rigueur et l’ excellente connaissance de l’art naïf, du contexte historique national, voire local, en ce qui concerne les oeuvres de Cécile Sabourdy constituent des atouts non négligeables, tout comme l’approche psychologique qui nous offre par moments un outil intéressant. Mais rien de plus. L’essentiel de la réussite de la démarche de la critique se situe selon nous ailleurs. Et face à l’art naïf, qui par définition, s’affranchit des règles classiques de la peinture, on se dit qu’en mettant une sensibilité exceptionnelle au contact d’un savoir solide, la conférencière n’avait pas d’autre choix si elle voulait entraîner ses auditeurs-spectateurs le plus loin possible dans l’univers et le style particuliers de chacun de ses trois artistes.

Comprendre Cécile Sabourdy, c’est d’abord permettre à cet auditeur-spectateur de lire cette artiste unique au filtre du Limousin, terre inspiratrice et fondatrice de l’oeuvre. Il ne s’agit pas pour autant d’une oeuvre simplement régionaliste. Cette oeuvre, affranchie de toutes les règles académiques, nous plonge dans une méditation sur l’être, la mémoire, le temps. nous plonge dans le mystère de la création poétique.

Pour entreprendre un commentaire aussi approfondi et subtil de cette oeuvre, il importe que le critique d’art assume - la subjectivité de son regard, car le savoir historique, technique ne suffit pas pour éclairer ce qui est à l’origine d’une création aussi inclassable. C’est ce regard sensible de la conférencière, jusque dans les détails de l’oeuvre, qui donne le ton juste et révèle la couleur de cette oeuvre singulière. Une telle démarche n’a donc pas fait l’économie de l’intuition et de la proximité secrète que la “critique biographe” entretient avec son sujet (qu’il s’agisse de Cécile Sabourdy, d’André Bauchant ou d’Existence).

Cette démarche ne consiste pas pour elle à analyser ces tableaux comme s’il s’agissait d’objets que l’on aurait la prétention d’expliquer une fois pour toutes. Notre critique, sensible à la poésie de l’art naïf et à chaque univers singulier, sait au contraire qu’aucun critique d’art ne peut en finir avec sa recherche, car sa recherche sur tel ou tel artiste naïf, c’est également la vie, la vie qui demeure pour chacun d’eux insaisissable et inaccessible, la vie, expression dans ces tableaux d’une vérité pure.

Cette subjectivité, toujours contrôlée par la raison la plus rigoureuse, permet à

la conférencière d’entrer au plus profond dans la personnalité de l’artiste présenté mais admet en même temps l’insondable mystère de l’oeuvre étudiée. Le regard subjectif ne se porte pas sur un objet mais cherche à entretenir un lien avec un sujet qui n’est jamais figé.

En écoutant la directrice du Musée Sabourdy analyser avec finesse des oeuvres aussi différentes, on n’a pu s’empêcher de penser à un grand philosophe français qu’on ne lit plus beaucoup aujourd’hui : Bergson. Pour Bergson, ce qui saisit le mouvement, la vie, c’est l’intuition, pas l’intellect. L’intuition est pour ce philosophe plus proche de la réalité, de la vie que l’intelligence ou le concept, car l’intelligence segmente. Il pensait d’ailleurs qu’on était plus proche du monde, de la réalité, par l’art, la musique, la poésie. Ce détour par Bergson nous rappelle aussi l’opposition que ce philosophe faisait entre le temps mécanique (celui de la montre) et le mode de la durée. La durée bergsonienne est du côté de l’intériorité. C’est bien dans cette intériorité que Stéphanie Birembaut installe son auditoire. Pour cela, elle a pris ses distances - juste ce qu’il fallait -  avec l’intellect qui découpe par séquence et reconstruit artificiellement la réalité qu’il observe . Elle a choisi d’atteindre le monde intérieur, monde de la durée intérieure que l’on ne peut pas découper et qui n’est accessible que par l’intuition.

Pas de méthode définie à priori et exagérément codifiée par conséquent, malgré une grande rigueur dans la construction du commentaire, mais une confiance étonnante à s’emparer des facultés créatrices de l’imaginaire dans la révélation profonde que l’imaginaire peut seul atteindre.

Cette critique place ainsi l’auditeur lors d’une conférence, ou le visiteur qui découvre le beau Musée qu’elle dirige, au coeur du secret de la représentation

et de l’écriture artistique, de la personnalité de l’artiste, au plus profond de sa vision.

Si vous voulez partager cette révélation sur les richesses et l’originalité de l’art naïf que l’on découvre devant les toiles exposées à Vicq sur Breuilh dans un cadre remarquablement fait pour les accueillir, n’hésitez pas à découvrir ce Musée exceptionnel. Vous ne pourrez pas être déçu.

                                 le 18 septembre 2019

                              Gérard Peylet, Président de l’ARAL

 

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